Tout d’abord, permettez-moi de vous présenter mes excuses pour la complexité des notions abordées dans cet article.

Une étude montre l’importance d’un juste niveau de récompense si on veut optimiser le plaisir ressenti…

Pour écrire cet article, je vais m’appuyer sur deux études, l’une de novembre 2014 qui montre que chez une personne qui consomme des drogues, si la consommation est occasionnelle, le plaisir ressenti est intense, si la consommation est chronique, le niveau de plaisir diminue et le stress augmente. Lors du sevrage, le plaisir disparait et le stress devient très important.

Cette étude menée par l’équipe du Professeur Olivier George est très intéressante car elle décrit un nouveau type de cellules nerveuses ; à côté des neurones à dopamine qui libèrent cette hormone, il décrit des neurones à dopamine capables de libérer en plus un précurseur du cortisol[1] : la corticolibérine.

Ainsi, lors d’une consommation occasionnelle de drogue, les neurones à dopamine qui ne libère que de la dopamine vont générer du plaisir.

Lors d’une consommation chronique, les deux types de population de neurones à dopamine vont être stimulés, le plaisir est moindre et le niveau de stress augmente.

En cas de sevrage, le plaisir disparait et seule la population de neurones à dopamine libérant de la corticolibérine fonctionne, générant du stress.

Si on transpose cette étude au niveau managérial, l’idéal serait de faire des retours positifs de manière occasionnelle et surtout pas systématique. Ainsi, le plaisir serait plus important et le niveau de stress plus bas.

La transposition pourrait paraître osée mais dans le cas des drogues, la molécule impliquée est la dopamine car la drogue vient bloquer un neurone inhibant la sécrétion de dopamine par le neurone à dopamine. Et dans le cas d’un retour positif dans le travail par exemple, la molécule qui va générer du plaisir est… également la dopamine et le mode d’action est identique, seule l’intensité du plaisir est différente.

L’autre étude montre l’importance d’un juste niveau de récompense si on veut optimiser la mémorisation…

L’autre étude, abordée dans un article de La Tribune de Genève du 25 septembre 2020, et a été menée par l’équipe du Professeur Sophie Schwartz, du Département des neurosciences fondamentales de la Faculté de médecine de l’Université de Genève. Elle aborde l’intérêt d’un juste niveau de récompense pour optimiser la mémoire.

Le Professeur Schwartz est très clair : « Lorsqu’on donne une récompense, cela entraîne une augmentation de la dopamine dans le cerveau, en particulier l’aire tegmentale ventrale. Celle-ci se trouve au cœur de notre système de récompense ».

Si la récompense est associée à la nécessité de retenir une information, l’hippocampe, zone du cerveau impliquée dans la mémoire, s’active également. Pour qu’une information soit mémorisée, il faut que des échanges aient lieu entre les circuits de la récompense et l’hippocampe.

Si l’on formule un juste niveau de récompense, la mémorisation sera optimale quelle que soit la récompense. Là encore, le Professeur Sophie Schwartz est très explicite : « Peu importe le type de récompense. Le mécanisme est essentiellement le même. La motivation intrinsèque, celle qui nous pousse à avoir envie de relever et réussir des défis, ou le besoin de reconnaissance sociale par nos pairs marchent aussi. »

« Lorsque la récompense est trop forte, continuer à apprendre n’est plus si important. Si je n’ai jamais de récompense, c’est trop d’énergie pour ma survie, il faut changer de stratégie » explique le Professeur Schwartz. Il faut donc des félicitations bien dosées.

La conclusion du Professeur Schwartz résume bien la situation : « L’important est d’adapter le niveau et surtout la fréquence des évaluations positives. Il s’agit de bien répartir dans le temps les récompenses, qui ne doivent pas être obligatoirement des notes. C’est souvent quand les évaluations ne sont pas suffisamment régulières, comme à l’université, que les échecs augmentent, surtout pour les étudiants qui ont une motivation intrinsèque relativement faible ».

Au niveau managérial, on perçoit là encore la nécessité du juste niveau de récompense si on veut que la mémorisation soit la plus intense possible.

Et si on recoupait les deux études… n’arriverions-nous pas à la conclusion que le succès et la mémorisation viennent de retours positifs sincères et authentiques…

Comment ne pas être tenté de recouper les deux études.

Si les récompenses sont trop fréquentes, systématiques, la première étude montre qu’une population de neurones à dopamine va libérer de la corticolibérine, un précurseur d’une hormone du stress, le cortisol. Ainsi, le niveau de stress augmente et la mémorisation est moins efficace !

Il faut donc formuler des retours positifs, authentiques, lorsque l’on en a envie, et non de manière systématique.

En revanche, si le succès ne vient pas de l’excès, il vient de la présence !

[1] Une des hormones du stress