Le stress des attentats…
Selon la société Celtipharm, qui analyse en temps réel les ventes de 4800 pharmacies représentatives, dans les jours qui sont suivi les attentats de janvier 2015 en Ile de France, les Français ont acheté 18,2 % de boîtes d’anxiolytiques ou d’hypnotiques de plus que d’habitude…

Mais pourquoi ce pic de stress inhérent aux attentats pourrait-il avoir des conséquences morales différées?
Il a été remarqué que le stress lié aux crises économiques, stress qui dure plusieurs mois à un haut niveau d’intensité, s’accompagne quelques années plus tard d’une aggravation des problèmes moraux. Ainsi, lors de la crise de 1929, le taux de suicide n’avait fait un bon aux Etats-Unis qu’en… 1932 ! Il était alors pratiquement le double de celui de 1920.
Partant de ce principe, en novembre 2011, lors de la Journée Nationale de l’Ecoute organisée à Paris par « S.O.S Amitié », une alerte avait été lancée à cette occasion par des participants à une table ronde sur la proximité d’un épisode moral difficile. En décembre 2012, on apprend que l’augmentation du nombre de suicides sur les voies ferrées serait de 30% plus élevé en octobre 2012 qu’en octobre 2011.
Le pic de stress lié aux attentats ayant été beaucoup plus bref que les longs mois de crise économique, l’accentuation de la souffrance morale pourrait avoir lieu au printemps de cette année. Il convient donc d’être vigilant.

Que faire ?
L’intérêt de savoir que la période proche risque d’être compliquée est de pouvoir agir pour en diminuer le plus possible les effets.
Il est possible de proposer trois axes de travail.

Tout d’abord, faire émerger des « facteurs de protection ».
Le Professeur Jean-Jacques Breton, professeur de psychiatrie canadien, explique que tout comme il existe des facteurs de risque, il existe des facteurs de protection : « On a beaucoup parlé des facteurs de risque dans la problématique du suicide. Mais ce qu’on a découvert, c’est qu’il y a aussi des facteurs de protection. S’il y a des facteurs de protection, le risque d’avoir des idées suicidaires diminue. Ce n’est pas magique, bien sûr, mais si on favorise ces facteurs de protection, les gens peuvent améliorer leur capacité à faire face aux événements stressants. On peut les outiller».
Parmi ces facteurs de protection, ceux auxquels on pourrait recourir concernent les liens sociaux, le sens, les objectifs…

Les liens sociaux :
Encourageons tout ce qui peut inciter les uns et les autres à mieux se connaître, à mieux se comprendre, aidons à la diffusion du respect et à la culture du sentiment de justice, favorisons le partage de passions…

Le sens :
Le sens est puissamment protecteur en termes de santé, de nombreuses études le montrent. Il est donc essentiel de cultiver le sens en aidant tout un chacun à bien voir à quel point il est un maillon indispensable de la stratégie globale.

Les objectifs :
« Le but fournit de l’énergie pour la vie » explique Mihály Csíkszentmihályi, le célèbre psychologue de renommée internationale. Avoir des objectifs ambitieux et les rendre réalistes grâce à des objectifs intermédiaires est la garantie d’une véritable qualité de vie et d’un certain succès.

Ensuite détecter les personnes en souffrance…
Osons développer ce qui marche si bien au Canada : les sentinelles. Il s’agit de faire émerger une véritable vigilance partagée en formant des citoyens à savoir tendre la main à leurs semblables lorsque ceux-ci traversent des périodes difficiles : les Bienveilleurs comme nous les appelons. Cette stratégie a été exportée dans la province de Liège en Belgique avec, là encore, des résultats intéressants.

Enfin, accompagner…
Accompagner les managers pour qu’ils soient vigilants sur la qualité des liens sociaux, sur le sens qu’ils transmettent à leurs collaborateurs, sur la manière dont ils fixent les objectifs.
Accompagner chaque collaborateur, détecté à temps grâce aux Bienveilleurs, afin qu’il renoue avec l’envie : envie de vivre, de réussir, de se dépasser…

En conclusion…
Voilà quelques « outils », pour paraphraser le Professeur Jean-Jacques Breton, susceptibles d’aider les collaborateurs des entreprises à traverser au mieux une période difficile. C’est le moment d’oser les mettre en œuvre. Souvenons nous de la très belle phrase de Sénèque :  » Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas, c’est parce que nous n’osons pas qu’elles sont difficiles ».