Une étude longitudinale a été menée par le Centre Japonais de la Santé Publique. Elle a été publiée en octobre dernier dans la revue Nature. C’est la première fois qu’une étude questionne ses participants sur ce sujet sur une aussi longue période.

Les effets du stress sur le cancer étaient jusque là divergents

En effet, différentes études ne vérifient aucun lien de cause à effet entre stress et cancer. On peut par exemple citer cette étude ayant porté sur des prisonniers danois ayant vécu des conditions atroces durant la seconde guerre mondiale. Ils n’ont pas relevé de liens étroits entre ces conditions de vie et le risque de développer un cancer.

Des chercheurs britanniques se sont également intéressés à ce lien (étude en question). Ils ont questionné 100 000 femmes sur leur niveau de stress et le risque associé de développer un cancer du sein. Malgré la très grande échelle de cette recherche, aucun lien avéré n’a été mis en évidence.

À l’inverse, une étude menée par des chercheurs de l’INRS (Institut National de la Recherche Scientifique) et de l’Université de Montréal, publiée l’an passé, montrait une corrélation entre le stress et certains cancers. Sur la base de déclarations de stress perçu, les personnes ayant eu une exposition prolongée au stress dans leur travail avaient plus de risques de développer 5 des 11 formes de cancer testées : cancer du poumon, du côlon, du rectum, de l’estomac et du lymphome non hodgkinien. Il fallait cependant, selon cette étude, travailler plus de 15 ans dans un contexte stressant pour voir apparaître ces risques.

Cette récente recherche apporte un éclairage nouveau

Jusqu’à la parution de cette étude menée au Japon, les chercheurs se basaient sur des analyses du parcours des personnes développant un cancer pour savoir si elles avaient vécu des traumatismes particuliers dans leur vie. Cette méthode, bien que souvent utilisée dans ce type de contexte, comporte de nombreux biais tant on sait que notre mémoire est malléable.

L’étude qui vient d’être publiée a débuté en 1990. Sur 4 années, plus de 140 000 personnes avaient alors répondu à la question : « À quel niveau évalueriez-vous votre stress dans votre quotidien ? ». Ils avaient 3 possibilités de réponse : faible, moyen ou élevé.

Durant 18 ans, ils étaient questionnés à ce sujet tous les 5 ans. 17 161 personnes ont été victimes d’un cancer sur cette période. Les chercheurs n’ont dans un premier temps trouvé aucun lien entre le stress perçu à un instant T et le risque de développer un cancer. Par contre, en analysant l’évolution du niveau de stress des participants de l’étude, ils se sont rendus compte que les personnes estimant avoir un niveau de stress « élevé » durant tout le suivi avaient 11% de risque supplémentaire de développer un cancer que les participants ayant déclaré avoir un niveau de stress « faible » durant tout le suivi.

Un lien plus fort chez les hommes

En plus de ce constat, les chercheurs ont mis en évidence que les hommes étaient particulièrement concernés par ce lien. En effet, parmi les hommes déclarant avoir un niveau « élevé » de stress sur le long terme, 20% de plus déclaraient un cancer comparé au groupe ressentant un niveau « faible » de stress dans sa vie. Ce lien s’avère être particulièrement net chez les fumeurs, les personnes en surpoids et les personnes dépendantes à l’alcool.

Il est donc possible que le stress n’engendre en lui-même aucun risque direct sur le cancer, mais plutôt qu’il trouble notre équilibre en nous donnant envie de manger davantage, de boire plus d’alcool, ou encore de fumer. Ce sont ces facteurs qui pourraient expliquer cette hausse des risques de déclencher un cancer lors de longues périodes de vie à de très hauts niveaux de stress.

Cette conclusion va dans le sens des études citées précédemment : de hauts niveaux de stress vécus sur de courtes périodes n’entraînent aucun risque particulier de développer un cancer.

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