La tribune du mois de juillet de Philippe Rodet sur le site de Ressources Humaines, « Focus RH« , est intitulée « Face au stress, le désir ! » Vous pouvez la lire en cliquant sur le titre.

De manière habituelle, on explique donc que le moyen de diminuer le stress est d’adapter les contraintes à la perception des ressources.

Si les objectifs sont fixés à des niveaux impossibles à atteindre, il faut en effet les adapter. Sur ce point, les travaux de Mihaly Csikszentmihalyi sont très clairs.

En revanche, il me semble indispensable d’agir, en parallèle, sur le désir car il rend les contraintes plus accessibles.

Si l’on doit se lever à 5 h du matin pour aller travailler dans des conditions pénibles, se lever est très difficile, le désir est faible. Si l’on doit se lever à 5 h du matin pour partir en vacances, se lever est un plaisir. L’horaire est le même, seul le niveau de désir diffère.

Or, en France, nous traversons une sévère crise du désir, crise qui s’illustre par la progression de la démotivation.

Entre 2002 et 2014, le pourcentage de salariés démotivés passe de 26% de nos concitoyens à 38%. Chez les cadres supérieurs, l’évolution est encore plus franche puisque l’on passe de 19% de cadres supérieurs démotivés en 2007 à 33% en 2010.

Restaurer le désir est essentiel parce que cela va diminuer les effets du stress.

Les travaux d’Alice Miller, décrivent ce qui se produit, lorsqu’une personne n’a plus de désir. Dans son ouvrage « Le drame de l’enfant doué« , elle montre comment un enfant trop soumis aux désirs de ses parents par crainte de perdre leur amour peut sombrer dans l’angoisse et l’ennui car il n’est plus conscient de son vrai désir. Or, c’est le vrai désir qui est source de motivation.

L’impact bénéfique du désir sur le stress avait également été illustré par une étude du «Center for Disease Control » d’Atlanta. Il avait été remarqué qu’au retour de missions, les travailleurs humanitaires faisaient d’autant moins de burn out qu’ils étaient plus motivés au départ.

Restaurer le désir est essentiel parce que cela permet d’allier au bien-être, la réalisation pleine et entière de soi-même, clé du bonheur.

Restaurer le désir doit être l’objectif de tous, depuis le sommet de l’entreprise. Le Président d’un Groupe peut être d’autant plus exigeant vis à vis de ses collaborateurs qu’il maintiendra le désir au plus haut niveau. C’est à cette condition qu’il pourra obtenir des résultats à la fois exceptionnels et durables. Cette culture du désir devra alors diffuser à tous les niveaux de l’entreprise. Si l’on remonte dans le temps, Aristote expliquait qu’ « il n’y a qu’un seul principe moteur, la faculté désirante« . Quant à Spinoza, il allait dans la même direction en précisant que « le désir est l’essence même de l’Homme« .

Mais, attention, le désir qui offre la réalisation pleine et entière de soi n’est pas que financier, et c’est peut-être là qu’est la plus grande difficulté.

Sur ce point, Gary Hamel a une formule évocatrice : « L’optimisation de la richesse n’a pas le pouvoir de mobiliser pleinement les énergies humaines ». Le désir qui nous motive le plus, celui qui nous permet de résister au stress et de réussir de manière exceptionnelle, n’est-ce pas le désir qui nous permet d’exister le plus possible ?

En conclusion…

Si l’on veut que les collaborateurs soient en bonne santé, il faut certainement adapter les contraintes au bon niveau. Mais si, en plus, on veut qu’ils se réalisent pleinement et vivent heureux, il faut cultiver le… désir. La psychiatre Catherine Reverzy, dans son ouvrage « Femmes d’aventure » illustre bien la puissance du désir dans la motivation de ceux qui aiment se dépasser, qui aiment dépasser les contraintes. Elle écrit : « Le désir ardent de se sentir pleinement exister en un Soi authentique entre dans la motivation de ceux qui aiment les aventures risquées« .