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Depuis quelques temps, on parle d’avantage de  la souffrance des dirigeants d’entreprise.
Cela semble logique car, en raison de la crise, on leur demande de plus en plus et eux ne bénéficient que très rarement d’un soutien de qualité. Qui plus est toute plainte émanant d’un responsable d’entreprise ou d’un décideur est souvent tournée en dérision.

Il convient de remarquer que, au-delà des dirigeants, cette situation est vraie pour toutes les activités comprenant un large degré d’autonomie ; paradoxalement trop d’autonomie est plus souvent à l’origine de difficultés que de bienfaits inhérents à la liberté d’action. Là encore, il faut un juste équilibre.

On a constaté l’intérêt d’un management de qualité dans la gestion du stress des collaborateurs. En effet, le management débouche sur une envie de travailler, c’est-à-dire sur la motivation. Or, la motivation est source de plaisir – l’un des neuromédiateurs qui intervient dans la motivation est la dopamine, hormone du plaisir – et on sait maintenant que le plaisir diminue la toxicité du stress.

Or, pour le dirigeant, qui va exercer le rôle de manager ? Qui va l’aider à relativiser des situations difficiles où il risque de se retrouver seul face à la presse ? Qui va l’encourager  quand  les objectifs financiers ne sont pas à la hauteur des espérances ? Qui va lui apporter les moyens de gérer la pression d’enjeu ? Qui va le rassurer quant à ses compétences et à la normalité de certaines difficultés ? Qui va l’aider à retrouver l’ardeur et l’énergie nécessaires à la création de résultat et à l émergence d’idées nouvelles ?

Homme beaucoup plus seul et isolé qu’on ne l’imagine, le dirigeant est souvent confronté à la souffrance liée à son activité. En plus, lorsqu’il traverse des phases difficiles, cela pourra avoir des répercussions sur sa vie de famille, sans qu’il ose expliquer à ses proches l’origine de ses difficultés. Les conséquences pourront alors l’entrainer dans une spirale infernale alliant fragilisation de la cellule familiale et difficultés professionnelles. La période actuelle, où la crise financière rend la mission de nombreux dirigeants bien plus difficile, doit nous inciter à attirer l’attention de celles et ceux qui sont en relation avec les dirigeants pour qu’ils veillent au moindre signe pouvant évoquer de grandes difficultés. Sinon, demain, la souffrance se traduira de plus en plus souvent par des drames comme ceux dont on a entendu parler récemment.

La redistribution des cartes due à la mondialisation nécessite de la part des dirigeants une inventivité et une intelligence des liens inédites. L’avenir n’est pas écrit, il est à construire. Les dirigeants doivent être porteurs d’espoir pour leurs collaborateurs et la société dans son ensemble.

Comment agir ?

Inciter le dirigeant, surtout lorsqu’il est jeune et certainement encore plus fragile à nouer des relations authentiques avec des collègues confrontés aux mêmes difficultés que lui. Sur ce point, une structure comme le Centre des Jeunes Dirigeants (C.J.D.) peut être une voie très intéressante. L’atmosphère y est à l’écoute, au partage et à la solidarité. Ce mouvement permet de se former au métier de dirigeant tout en cultivant le sens  du bien commun.
Encourager le dirigeant, lorsqu’il dirige une entreprise depuis quelques années et qu’il est sorti de la phase pionnière – celle où tout est difficile mais où l’on est passionné par ses premiers vrais succès – à bénéficier d’un accompagnement. Quand on procure de l’activité à des centaines de personnes, quand les conséquences de ses actes se chiffrent en millions d’euros, que l’on bénéficie d’un soutien, individualisé et adapté, de qualité semble légitime.
Au niveau des salariés, on a longtemps pensé que la seule technique suffisait à la performance. On commence à reconnaître que la performance de l’entreprise va de paire avec le bien-être de ses acteurs.
Le bien-être des dirigeants a des conséquences sur sa vie, tant professionnelle que personnelle, mais aussi sur la vie de son entreprise et celle de ses collaborateurs. Diriger est un métier passionnant et  difficile  qui engage l’être tout entier. On ne dirige jamais pour soi même. Le pouvoir, entre autres choses,  est un acte tourné vers les autres et vers la société.

Parallèlement, on a souvent imaginé que le dirigeant était un surhomme. Et s’il s’agissait avant tout simplement d’un homme visionnaire, passionné et conquérant… Un homme qui doit parfois accepter d’être « managé »…

Evelyne Bertin et Philippe Rodet